Thursday, April 28, 2011

Quand la télévision veut imiter internet


Il y a très longtemps en 1995 à Montréal, je me suis rendu au Festival d’art électronique ISEA. A cette époque j’avais été engagé par les Nouveaux Programmes de Canal Plus pour réaliser une série de reportages sur les différents artistes invités. Parmi les œuvres présentées certaines m’avaient marqué et j’y pense souvent aujourd’hui en constatant l’incapacité chronique de la télévision a créer des programmes à destination de l’audience internet et le fossé socio-culturel qui sépare les programmateurs de ce public.

The Consensual Fantasy Engine

Expérience de fiction télévisée interactive The Consensual Fantasy Engine (1995)


Lors d’une soirée organisée durant ce Festival nous sommes conviés à participer à un spectacle interactif créé autour de la fameuse poursuite télévisé d’O.J Simpson qui s’était déroulée en direct à la télévision américaine quelques mois plus tôt le 17 Juin 1994 à Los Angeles. The Consensual Fantasy Engine est alors un programme informatique créé par deux jeunes artistes Paul Vanouse et Peter Weyhrauch capable de créer sur un écran de télévision une fiction interactive en fonction des réponses du public présent dans la salle et acquises en direct grâce à certaines questions qui apparaissent sur un écran. Le programme réagit aux applaudissements du public et modifie le scenario du film en fonction de ses réactions. Le public via le programme devient l’auteur et metteur en scène d’un programme télévisée original et ludique.

Le Chat du Prisonnier

Expérience de diffusion d'un chat en direct durant un épisode de la série Le Prisonnier (1995)
     
Le lendemain nous sommes invités à une expérience de chat en direct menée par la jeune chaîne dédiée à la science-fiction SCIFI Channel. Il s’agit cette fois de faire participer en direct lors de la diffusion d’un épisode de la série culte Le Prisonnier, les membres d’une communauté on-line (la communauté new-yorkaise ECHO) qui aura l’occasion de dialoguer pendant la diffusion du programme grâce à une fenêtre de chat située sous l’image. L’épisode archi-connu du Prisonnier prend alors pour le spectateur une nouvelle dimension, il permet un lien direct et fédérateur entre les membres de la communauté, l’écran de télévision devenait alors un espace virtuel d’échange communautaire et rien n’empêchait de suivre l’épisode à l’ancienne en se concentrant sur l’image.

Webdoc, Transmédia et TV connectée


De retour à Paris, je croyais avoir vu là-bas ce qui allait s’imposer comme le nouveau standard de la télévision de l’an 2000. Une télévision ouverte sur le monde, connectée, accessible au téléspectateur autrement que part sa télécommande, une fenêtre interactive… J’imaginais alors de belles soirées en famille avec une rediffusion de nos meilleures séries françaises Les cinq dernières minutes, Thierry la Fronde, ou l’intégrale de la série Maigret systématiquement accompagné d’une fenêtre de chat accessible au public et visible par tous en direct. Une grande soirée par mois consacrée à un héros national Louis De Funès, Charles de Gaulle, créé par l’applaudimètre de millions de spectateurs créant un remix télévisuel de leurs meilleures apparitions, le tout orchestré par les frères Bogdanoff en habit de lumière, avec une musique originale joué par Laurent Garnier en direct du Grand Rex. Ce n’était pas grand chose… On aurait bien rigolé et l’audience aurait suivit, c’est sûr.

Et pourtant, quinze ans plus tard, en 2011 la télévision n’en finit pas de ressembler à ce qu’elle était à l’époque. A défaut de créer les programmes de demain elle créée des mots étranges et des concepts fumeux : webdoc, transmédia et envisage un jour de se connecter.

J’oubliais, lors de cette conférence à Montréal le grand écrivain américain Bruce Sterling lançait également son projet encyclopédique en ligne sur les médias disparus The Dead Media Project…


The consensual fantasy engine
Bruce Sterling
The dead media project
Prisoner chat
Stacy Horn créatrice d’ECHO






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